vendredi 25 avril 2025

Firzel, chanteur de Saint Pol sur Ternoise

 

 Marcel Bayart (1944-2016) avait fait des recherches et publié de nombreux articles sur cet artiste qui était son cousin. Hélas ses articles ont disparu de l'internet.

Les voici :

Zéphir Joëts dit Firzel, né et décédé à Saint-Pol

Avec son visage durement sculpté, ses épaules de catcheur, la pointe noire de ses cheveux sur le front... Zéphir Emile Louis Joëts naquit à Saint-Pol-sur-Ternoise, le 30 juin 1895. Il y décéda le 22 février 1948.
Cet artiste prit d'abord le pseudo de Zéphir, puis de Firzel. Ce fut un compositeur, un conteur, un chanteur, un fantaisiste qui connut la gloire, notamment entre les deux guerres. Il avait fait ses débuts sur la scène le 19 janvier 1908, dans la revue locale "Saint-Pol y passe" de M. Milléquant, alors professeur au collège. Le petit Zéphir Joëts, apprenti pâtissier, alors âgé de 12 ans, avait recueilli un vif succès pour son aplomb, son entrain et sa verve. Il prêta bien volontiers son concours aux organisateurs de fêtes locales. Et bientôt, s'évadant du parfum des gâteaux, il partit à la conquête du grand public.
Entre temps, il avait chanté pour les poilus dans les hôpitaux. Il était d'ailleurs titulaire de la croix de guerre 14-18. Un article de "L'Abeille de la Ternoise" consacré au conseil de révision des "Marie-Louise" de Saint-Pol, le 3 mars 1914, fut publié le 27 juin 1964. Zéphir Joëts figure sur la photo (que nous recherchons) illustrant l'article.

Il s'installe en 1919, à Paris, 3 rue Montholon et débute comme "comique fantaisiste" sous le nom de Zéphir qu'il conserve pendant 5 ans avant de prendre celui de Firzel. Plus tard, il sera domicilié au 34 du faubourg Saint-Martin, à Paris.
Au printemps de 1923, il effectue une première grande tournée en Belgique: Verviers, Charleroi, Bruxelles, Louvain, Liège... Rengagé au Palais d'Eté de la capitale belge en octobre suivant, on peut lire dans le Passe-Partout du 13 octobre 1923 : "Ce jeune artiste qui n'est dans le métier que depuis 4 ans marche à grands pas sur la trace des Mayol, Dalbret et Georgel..."
Il chante à L'Olympia en aôut 1924, notamment des chansons de Georgius. Il sera dès lors applaudi dans tous les cabarets parisiens : L'Alhambra, L'Empire (5 fois), L'Olympia (12 fois), Le Petit Casino, L'Européen, Bobino, etc..., et en Province, il fait la tournée des casinos et séjourne dans de nombreuses villes où il y avait soit un music-hall, soit un cinéma à attractions ou un cabaret. Il effectuera de nombreuses tournées à l'étranger: Belgique, Suisse, Grèce, Hollande, Afrique du Nord, Syrie, Sénégal (Dakar)... et l'on pourra l'entendre chanter sur la T.S.F. du moment (Radio-Lille notamment).
A Saint-Pol. Il aimait venir se retremper au pays natal, musardant la ligne à la main, sur les bords de la Ternoise, et apportant son précieux et gracieux concours aux fêtes organisées par des sociétés saint-poloises. En 1925, au cours d'une représentation organisée par l'USSP, il chanta "Gloire à l'USSP", une chanson de sa composition sur l'air de "Rugby marche".
Sa discographie est sans aucun doute la partie la plus étonnante de la carrière de Firzel. Car, de 1925 à 1936, cet artiste va graver près de 70 disques publiés sur 10 marques différentes. En 1930, par exemple, son nom figure à la fois sur les étiquettes Idéal, Parlophone, Polydor, Pathé et Artiphone. Firzel (pour l'anecdote) donnait un exemplaire de chacun de ses disques à ses amis de la "Taverne de l'Artois", à Saint-Pol. Empilés, ces disques auraient représenté une hauteur de 1,60 m. Malheureusement, une bombe, en 1943, fit voler en éclats toute la collection. Beaucoup de ces enregistrements sont aujourd'hui introuvables, malgré les efforts déployés par les collectionneurs pour les retrouver.
La majeure partie (34 disques) de sa discographie s'effectue chez Parlophone, de 1929 à 1932 : des succès d'Alibert (Un cocktail), de Gabin (Léo, Léa, Elie), de Burnier (Souviens-toi), de Milton (T'en fais pas Bouboule), de Chevalier (Mon Idéal), de Garat (Avoir un bon copain), mais aussi des chansons ou monologues en patois du Nord (L'carrette à quiens, La petite Lilloise, Le p'tit Quinquin, Si j'avos su j'aros resté garchon chez Cristal...). Il chante aussi les mérites de la Citroën sur des paroles de Gabriello (Citroën et Un petit coeur et une citron). Firzel et Gabriello (dont la mère Léontine Wallart naquit à Saint-Pol en 1859) seront d'ailleurs associés sur bien des partitions.
On possède aussi de Firzel "L'esprit français", un recueil de 100 histoires de captivité, d'occupation, de libération qu'il a recueillies. A. Daverdain, 50 Faubourg Saint-Denis, à Paris (Xe), en fut l'éditeur. Allez, vous en voulez une ! Voilà. Celle-ci est du général de Gaulle. Il passe en revue un régiment de F.F.I. qui fait glorieusement le coup de feu. Les officiers sont excessivement jeunes, et le colonel complètement imberbe. Le général lui serre la main et lui demande gentiment : "Je me demande ce qui a pu nuire à votre avancement."
Le 24 juillet 1947, il fait une dernière apparition dans l'émission "Rires et sourires" de la Suisse romande et meurt à Saint-Pol, le 22 février 1948, âgé seulement de 52 ans. Terminons en rappelant que Firzel est le cousin de nombreux Saint-Polois (Joëts, Degouve, Bayart, Morel, Lesieux, Lemaire, Domé, Mille, Lombart, Poynard, Bigand, Defiez, Jacquart, Clulow, Denudt, etc...) et de Edmond Edmont et Alfred Demont, deux autres célébrités saint-poloises.

Article rédigé par
Marcel Bayart
d'après un article de Pascal Duboc

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La belle histoire de Firzel commence le 19 janvier 1908 dans la revue locale « Saint-Pol y passe ». La future vedette porte son vrai nom, Zéphir Joëts. Un garçon de douze ans, apprenti pâtissier, qui se produit sur scène avec une verve et un entrain qui font l'unanimité. Ce petit Saint-Polois se prend vite au jeu. Désormais, il participera avec plaisir à de nombreuses fêtes locales, délaissant la boutique de gâteaux pour partir à la conquête du grand public.
Quand la Première Guerre mondiale survient, Zéphir, 19 ans, distrait les Poilus en chantant dans les hôpitaux. Il sera décoré de la Croix de guerre à l'issue du conflit. C'est aussi après cette guerre qu'il lance réellement sa carrière de comique fantaisite en s'installant à Paris, rue Montholon. Zéphir fait ses classes pendant cinq ans. Puis se choisit un nom de scène. Ce sera Firzel, un pseudonyme qui rappelle en verlan son vrai prénom. Au printemps de l'année 1923, le jeune Saint-Polois effectue sa première grande tournée en Belgique. Ce qui lui vaut d'être engagé au Palais d'été de Bruxelles à l'automne de la même année. Le Passe-partout, journal local, parle alors d'un « jeune artiste qui n'est dans le métier que depuis quatre ans, mais qui marche déjà à grands pas sur les traces des Mayol, Dalbret et Georgel ».
La carrière de Firzel est lancée. Le voilà en août 1924 sur la scène de l'Olympia, interprétant des chansons de Georgius. Tous les cabarets parisiens lui ouvriront alors leurs portes : Bobino, l'Empire, l'Alhambra, l'Européen, et encore et toujours l'Olympia, qui l'accueillera... douze fois ! Firzel a gagné ses lettres de noblesse dans le métier et effectue de nombreuses tournées à l'étranger (Suisse, Grèce, Afrique du Nord, Syrie, Sénégal...). Il chante Avoir un bon copain et Ma p'tite lilloise, fait la promotion en chansons de la marque Citroën, et transmet des chansons patoisantes comme Le P'tit Quinquin ou encore L'carette à quiens.
On sait peu de choses sur la vie que menait Firzel à Paris. On sait en revanche que ses retours à Saint-Pol étaient très souvent des moments mémorables, l'artiste rehaussant de son talent les fêtes organisées par les sociétés locales. Comme ce jour de novembre 1925 où il entonna une chanson intitulée Gloire à l'USSP. Firzel était une vedette partout, et plus simplement un bon copain dans sa ville. C'est là qu'il est mort, chez son cousin Émile Dupuis, au 4 rue des Carmes.

Article rédigé par :
Marcel Bayart

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Ma p'tite Lilloise !

Les paroles de cette chanson furent écrites par Paul Brebant [1888-1969]. La musique, orchestrée par Manuel Puig, fut composée par Frédo Gardoni et L. Silberman. Ce gros succès du Nord fut enregistré sur disque Pathé (n° 3864) et sur disque Idéal (12.883) par Firzel, de l'Empire. On pouvait se procurer ce fox-trot chez Batifol, 11 rue du Vert-Bois, à Pais. Manuel Puig, 8 rue Maublanc (Paris XVe) était propriétaire de l'oeuvre enregistrée aussi sur disque Pathé par les As du Phono, Frédo Gardoni et Mauel Puig.
Rappelons, une fois encore, que Firzel était le nom de scène de Zéphir Joëts (qui se prononçait alors Jout' ; Saint-Pol-sur-Ternoise 1895- 1948) qui repose au cimetière Est de sa ville natale. Entre 1981 et 2002, Jean-Christophe Averty parla de Firzel dans ses émissions "Les cinglés du Music-Hall" sur France-Inter, France Musique et France Culture.Ce célèbre chanteur et fantaisiste, resté dans les mémoires des anciens Saint-Polois, enregistra de nombreux disques 78 tours à saphir et à aiguille, entre 1923 et 1944.
 
 Ecouter ICI
 
Ma p'tite Lilloise

I. Certain soir à Saint-Maurice,   Je gambillais chez Beudart,   Quand de la petit' Clarisse,   Je rencontrais le regard.   Je lui dis: "Mademoiselle,   Acceptez cette java,   Sans se fair' prier la belle   Répondit : "Te m' plais, cha va !"
Refrain: Ma p'tit' Lilloise   C'est un bijou ;   Quand ell' patoise,   C'est drôl' comm' tout.   Ell' est joyeuse,   Ell' est rieuse.   Ma p'tit' Lilloise   Me rendra fou !


II. Ell' n'est pas du tout bégueule,   Et je ris quand ell' me dit:   Viens, j' t'inmène au bos de l' Deûle,   J' te f'rai vir un biau p'tit nid.   Ell' m'amus' cette petite,   Quand ell' ajout' sans façon:   Si te m'offr's eun' portion d' frites,   J' t'imbrass'rai su' tin minton. (Refrain)


III. Où je la trouv' très cocasse,   C'est quand l' dimanch' nous allons   Fair' un tour à la ducasse   Où toujours nous rigolons.   Ell' me dit: "j'aim' bin les couques, (1)   Et m' langu' fil' parc' que j'in vos,   Mais ell's sont pleins' de brins de mouques, (2)   Viens putôt su' les qu'vas d' bos." (3) Refrain.


IV. On a parlé mariage,   Et cela devient plaisant,   Car, depuis, son babillage   Est encor' plus amusant.   Si nous n' mingeons qu' des peunn's tierre, (4)   Dit-ell', on s'in contintra,   Mêm' si on n'a qu'eun' cayère, (5)   J' te dis qu'on in sortira. (Refrain)

(1) couque-baque ou couque-bocque: crêpe faite avec de la farine de "boquette" (blé sarrasin ou noir) et du beurre. A Mons, on nomme cette pâtisserie "boucancouque"
(2) mouche (du latin musca)
(3) chevaux de bois (queva ou qu'va, du latin caballus)
(4) "peun" ou "pun d' tierre", pomme de terre (un "pun" est une pomme, du latin pomata, bas latin pomum, le fruit)
(5) chaise (en vieux français: chaière, du latin cathedra).

le 29 mai 2009.

Article rédigé par : 
Marcel Bayart
 
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Un article trouvé dans Le Phare de Calais du 21/9/1943
Complimentons Firzel d'avoir évité cette facilité [le répertoire frisant la grossièreté]. Ce chansonnier sait toujours rester bon enfant et d'une saine gaieté. Ses histoires de bègue comme ses histoire lilloises déchainèrent les rires. Éclectique, il sut également mettre sa voix en valeur avec Le Maître à Bord.
[…]
FIRZEL l'énergique avec son visage durement sculpté et ses épaules de catcheur, la pointe noire de ses cheveux sur le bas du front, Firzel nous conte son histoire :
- Mes parents m'avaient fait pâtissier !... Mais au cours de la Grande Guerre, j'eus l'occasion de chanter pour les poilus, dans les hôpitaux. C'était mon rêve. Dès 1919, je tentais ma chance et j'ai réussi. J'ai fait les plus beaux pays du monde : la Syrie, la Grèce, la Suisse, la Hollande. J'ai chanté 12 fois à l'Olympia ; 5 fois à l'Empire
- Êtes-vous du Nord pour si bien parler lillois ?
- de Saint-Pol-sur-Ternoise
- Quels sont vos projets ?
- Je vais prendre quelques jours de vacances...
Roulant ses terribles épaules, Firzel ajoute :
- Je vais pêcher à la ligne...

partitions de ma collection

chansons créées et chantées par Firzel

- Beaux soirs d’orient, Reg/Jean Peyronin
- Ça c’est pis que tout, Gaston Gabroche/Gaston Claret
- Dans l’sens unique, Géo Roger/Vincent Scotto
- En sortant de la revue, Georgius/J. Creus
- Femmes que vous êtes jolies ???, Zéphir
- J’ai l’béguin pour toutes ces femmes, L. Despax/J. Eblinger
- La java des Ch’ti’mis, Stollé/Worting & Eddy Frédo
- Je me soule, Henri Poupon/Blanche Poupon
- Les pantins, Pierre Alberty/Léojac
- Ma crotte, Plébus & Gilbert/Victor Alix
- Ma petite Lilloise, Paul Brebant/Fredo Gardoni & L. Silberman
- Mon cousin réserviste, Souplex/Gaston Claret
- On attends toujours quelque chose, Gabriello/Gabaroche et Claret
- Un p’tit million, Ch.-L. Pothier/L. Raiter & L. Izoird
- Quand on a un’ p’tit’ femme à son bras, Léo Lelièvre & J. d’Hirlaux/Laurent Halet
- Si j’avais des sous-sous, Ch.L. Pothier/Ch. Borel-Clerc
- Sur les quais de Paris, Jean Rodoor/Van Hoorebeke
- Trésors d'amour, Gustave Het/E. Dufrenne
- La Valse des coups d’pied au…boum !, R. Desmoulins/Domme & Valfy
 
 
 

mercredi 13 novembre 2024

Nellie Laurence (1938-2024)

Nelly Le Junter nous a quitté au début de cette année, discrètement.
 
source Gallica

Quelques textes récupérés sur l'internet :
Sa carte de visite : Née à Dunkerque [en 1938] d’un père Breton [d'origine bretonne, ses parents sont de Lannion, mais lui est né à Dunkerque] et d’une mère [d'origine] flamande. Surtout interprète, bien qu’elle ait elle-même écrit quelques chansons et lancé des idées aux auteurs qu’elle aime : Bergmann, Dimey, Darnal, Fanon, Fumière, J. Bouquet, Diéval, Robokowski et d’autres…
Elle est aussi comédienne : près de cent représentations en trois saisons avec la revue musicale de Boulogne
[voir plus bas]. Un répertoire riche, dans lequel elle puise selon les publics : salle, cabaret, chapiteaux ou dîner-spectacles. Ou encore celui des croisières, Méditerranée, Canaries, Iles grecques, Antilles, etc…
A l’étranger, elle mène son spectacle de chansons en anglais. Mais c’est en français qu’elle a gagné le Prix de la Meilleure interprète en cette langue au Festival mondial de Lisbonne. En télévision elle a été l’invitée de J. Kerchbron, J-M. Coldefy, J. Laviron, J-P Foucault et G. Bounoure, Sabatier, P. Sevran, mais aussi à Monte-Carlo, en Tunisie, Maroc et Espagne. Michel Drucker et J-P Elkabbach l’ont reçue dans leurs radios. Nellie Laurence à participé aux spectacles de S. Adamo, J. Halliday, J. Clerc, Lenorman, A-M. Carrière, Mouloudji, R. Devos et bien d’autres.
Discographie de qualité à travers plusieurs 45 t dont celui de l’Unicef (« Ouvrez les frontières ») et 30 cm (« Chansons en nord et en couleurs ».
Nellie Laurence est la créatrice de « Ville de Lille » une chanson de Michel Robokowski et J.C Daigle.
La carrière d’une artiste authentique, l’une des ambassadrices de la Chanson Française de toutes les époques. 
Quand la chanson se fait Femme, elle s’habille aux couleurs de la tendresse et de la passion. Elle caresse les mots des poètes avec  la complicité des tempos de la musique, pour que se marient sensibilité et fantaisie. Nellie Laurence appartient à cette race d’interprètes qui ont su mettre la chanson au féminin. A cette race d’artistes qui préfèrent la scène et le public vivant au disque éphémère.
Ils sont encore quelques-uns en France, à aimer la Chanson parce qu’elle est l’art le plus consommé de la communication.
Ecouter et regarder Nellie Laurence, c’est réapprendre que la qualité de la vie, c’est aussi ces mots et ces notes qu’une voix amie vient dire au cœur et à l’esprit.


La Voix du Nord du 6/12/2007
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Nelly Lefebvre est décédée, le mercredi 10 janvier. Pendant dix-sept ans, jusqu’en 2001, place aux Oignons, Nelly et Robert Lefebvre ont géré la Maison du terroir, lieu où s’exposait la peinture du Nord. À deux, lui l’ancien journaliste à La Voix du Nord puis à la télévision (« Les Rendez-vous du beffroi »), elle l’artiste, qui a chanté sur le France, a enregistré des disques sous le nom de Nellie Laurence, a participé la revue de Boulogne ainsi qu’à des tournées sur le car-podium de La Voix du Nord, ils ont toujours eu à cœur de défendre la culture flamande et patoisante. On leur doit aussi la création, à Lille, du Noël en ch’ti. Après le décès de son mari, en 2004, qui a aussi été membre du célèbre groupe des Capenoules, Nelly Lefebvre lui avait consacré un ouvrage, Robert Lefebvre, en Nord et en couleurs. Preuve, encore, de l’attachement du couple à la région.
VdN 15/1/2024

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Quelques vidéos sont visibles sur l'internet, j'ai choisi celle-ci car elle est réalisée par Bernard Claeys, un Lillois bien connu sur ce blog

Une production de FR3 Lille en 1979, elle y chante :
- La femme saison (paroles Pierre Dubois, musique Philippe Barraqué)
- J'ai vu l'enfant (paroles de Nellie Laurence, musique Jean-Luc Drion)
- Le Myosotis et la rose (W. Boillod)
- La Côte d'Opale (Jean-Claude Darnal)

Direction musicale : J. Buisine et J.-L. Drion
J'ai réalisé celle-ci sur la chanson Dunkerque de Julien Bouquet



Discographie :
Ces nuits ces jours (Déesse DDP 109 M) (1967 ?)
Chansons en Nord et couleurs (Déesse DDLX 194)
Dunkerque, la chanson de l'anniversaire mai 40-mai 80 (Déesse DPX 740)
Mets l'amour dans les violons/Ma ville (Déesse DPX692)
Ouvrez les frontières (Unicef DPX 805).  (1983)
Que je le veuille ou non (Déesse DPX 675).

Revues boulonnaises :
1975 : C'est cor à voir, de Marvas
1981 : Quo q't'in pinses, de Ch' Guss et Jean Jarrett
1983 : C'est pon possible, de Ch' Guss et Jean Jarrett, spectacle filmé par FR3, produit par Robert Lefebvre, réalisé par Bernard Claeys
source : Un siècle de revues patoisantes boulonnaises, Claude Faye, 2003


1974, source : Archives municipale de Boulogne/Mer

mardi 12 mars 2024

Mary-Lyse, chanteuse roubaisienne

mise en ligne le 24/3/2017
mise à jour le 12/3/2024 : ajout des dates de décès des époux


Mary-Lyse, photo Jérome, Paris
collection personnelle


Fernande Desbarbieux est née à Roubaix le 5 mai 1923. Ses parents sont ouvriers d'usine, le père conducteur de machines et la mère ourdisseuse, tous les deux de familles roubaisiennes. Fernande fait ses études à l'école de filles de la rue Gambetta, elle obtient son certificat d'étude en 1935. Elle poursuit ses études à l'Ecole Pratique de Commerce et d'Industrie de Roubaix. Elle est encore écolière quand elle participe à son premier crochet (concours de chant) organisé par le Sport Ouvrier Wattrelosien, je n'en connais pas le résultat, mais elle chante en public pour la première fois deux mois plus tard à Flers, pour l'Amicale laïque. Elle n'a pas 15 ans. Elle se produit ensuite à Mons-en-Barœul en février et en mai 1939. Elle interprète un répertoire de chant lyrique : La rose de la Lande de Schubert, la Berceuse de Mozart et Paysage de Reynaldo Hahn.

collection personnelle

Elève au Conservatoire de Roubaix, elle se produit lors des examens et concours en juin et juillet 1939. Elle ne semble pas avoir obtenu de prix. Ayant déjà comme projet de faire du chant sa profession, elle s'inscrit à une émission proposée par la Radio PPT Nord, Conseils et essais pratiques au micro pour chanteur, en juillet 1939. Trois mois plus tard elle compose la musique d'une chanson sur les paroles du chanteur roubaisien Robervyl : La Marche des Sapeurs qu'il interprète début novembre 1939, lors de manœuvres militaires quelque part en France. Elle compose, en novembre 1940, La Marche des élèves mécaniciens, en hommage à l'école Hanriot à La Rochelle. Au début de la guerre elle apporte son soutien aux familles des prisonniers en chantant régulièrement pour le Comité d'entraide. Elle est désormais connue sous son pseudonyme Mary-Lyse, qualifiée sur les programmes de chanteuse à voix ou chanteuse d'opérette. En juillet 1942 elle assiste aux galas du Café du Bazar à Roubaix, avec aux programmes la grande chanteuse de l'époque Elyane Célis et la chanteuse Luce Bert à qui elle fait part de ses projets de carrière dans la chanson.

Journal de Roubaix


1942
Collection personnelle


Cependant elle continue de se produire dans les galas de bienfaisance pour les prisonniers et les anciens du 100e RI. En février 1943 elle reçoit sa première convocation de l'agence Nord-Spectacles de P. Laborde-Bertal pour signer des contrats d'artistes. Elle doit se produire à Tourcoing (Grand Café), Lys les Lannoy, Roubaix (cinéma Noël) et à Rosendael (café Arcier). Ce tournant professionnel se fait après un évènement artistique rare à Roubaix, la première d'une opérette au Grand Théâtre, Rêve de Gitane, le 26 février 1943, dont la musique est de René d'Archambeau, un compositeur belge de Verviers et c'est à ce compositeur qu'elle demande de mettre en musique un de ses poèmes, Simple aveu, en mars 1943.


collection personnelle


Mary-Lyse compose au piano
collection personnelle


Très satisfait du résultat, René d'Archambeau lui demande aussitôt d'autres poèmes et lui propose même d'éditer la partition en petit format, qu'il est prêt à financer. Je ne sais pas si Mary-Lyse y a donné suite. Les contrats se succèdent et Mary obtient sa carte professionnelle du Syndicat des Artistes de Variété, document indispensable pour se produire à cette époque très règlementée, ainsi que sa carte d'identité professionnelle.


collection particulière


La rencontre avec Luce Bert en 1942 a été bénéfique. C'est sur sa recommandation qu'elle demande au chanteur Marcel Malloire, secrétaire de Vincent Scotto, de lui faire des orchestrations de chansons. Ces partitions sont indispensables pour se produire dans les cabarets parisiens. Accord immédiat de Malloire, il lui fait un devis de 390 francs pour 6 chansons. Marcel Malloire (1889-1959) est l'époux d'Yvonne Thomson (1895-1970), accordéoniste, pianiste et compositrice, c'est certainement elle qui a fait ces orchestrations. Grace à la facture détaillée envoyée par Malloire nous connaissons précisément le répertoire de Mary-Lyse à cette époque. Les orchestrations ont été faites sur ces chansons : Tu m'apprendrasTout en flânantC'était pour rireBonne nuit, maman (Gute nacht, mutter), Les fleurs sont des mots d'amour, et Une charade, qu'elle chante un ton plus haut que Danièle Darrieux.
D'avril à septembre 1943, Mary-Lyse se produit régulièrement, à Béthune (Evo Dancing), Lille (Cabaret Ali Baba), Armentières (Café de la Paix), Roubaix (cinéma Royal-Leleu), Tourcoing (Grand Café), Rosendael (à l'Hippodrome), Valenciennes, (le Savoy), Roubaix (cinéma Renaissance), Montreuil-sur-Mer (Electric Ciné), Saint-Pol-sur-Mer (café Garein), Hénin-Liétard (au Capitole), Armentières (café de l'Harmonie), Bruay (Casino Palace), Chimay (Casino Palace) et à Calais (Ciné Pax). Son cachet évolue lentement, de 400 F pour les premiers contrats, il tourne ensuite autour de 5/600 F, avec parfois des contrats de plusieurs tours de chant par jour pour 1.000 F et 2.200 F à Calais pour 3 représentations sur 2 jours. Les frais de déplacement et d'hôtel étant à la charge de l'organisateur.

contrat Nord-Spectacles
collection personnelle

En septembre 1943 elle reçoit une lettre de l'agence parisienne Dhomont qui lui demande des photos et prend un rendez-vous pour rencontrer des directeurs de cabaret, l'agence lui propose, pour la fin du mois, une audition au Théâtre de l'ABC, le célèbre Music-hall inauguré en 1935 où se produisent les plus grands artistes de l'époque (Marie Dubas, Frehel, Edith Piaf, Charles Trenet, etc.). En octobre André Dhomont, directeur de l'agence, devient son agent exclusif pour deux ans et lui fait signer un contrat pour ce théâtre, contrat qui est mentionné dans un courrier, mais n'a pas été conservé. Le même jour elle reçoit une lettre du chanteur Firzel, originaire de Saint-Pol-sur-Ternoise. Il lui signale son passage à Lille, au cabaret Le Coucou, lui demande une photo et transmet un contact à Reims pour un contrat. Son agent parisien lui trouve un contrat d'une semaine au cabaret Le Chapiteau, 1 place Pigalle, à Paris.

Paris Soir, 10 octobre 1943
source : Gallica

Pendant qu'elle est à Paris, elle participe au tournage du documentaire de P. E. Decharme, Vive la mariée, elle touche 1.000 F de cachet. Le négatif sur nitrate est conservé au Centre National du Cinéma à Bois d'Arcy, mais n'est pas consultable. Toujours à Paris, elle se produit 12 jours au cabaret Le Doge, rue Volney, pour 6.600 F, deux passages par jour en soirée, relâche le dimanche. En novembre Firzel lui écrit qu'il est déçu de ne pas l'avoir vue lors de son séjour parisien et l'invite à déjeuner lors de son prochain passage… Le 30 novembre 1943 elle signe un contrat d'enregistrement avec la Société Polydor, représentée par Jacques Coulon, d'une durée de 6 mois, pour un minimum de 2 enregistrements, 400 F par face, à diviser par le nombre de musiciens. En décembre elle est à Bruxelles au cabaret Le Passe Partout, 14 jours à 1.000 F par jour. A son retour elle reçoit une proposition d'enregistrement de la Société des Editions Continentales pour enregistrer, sur un disque souple, des chansons de son répertoire. Le 21 décembre elle signe un contrat pour le cabaret de Suzy Solidor par l'intermédiaire de l'agence Dhomont pour un mois de représentations à 500 F par jour. Le 4 janvier 1944 elle se fait faire un portrait chez le photographe Jérome à Paris (c'est celui qui est au début de cette page). En février l'agence Dhomont lui propose un rendez-vous avec le cinéaste Marc Allegret pour un projet de film et le 10 elle reçoit une invitation à ce rendre à Radio-Paris pour une audition. Ce mois de février voit les contacts professionnels affluer, le colonel Vidal (futur agent artistique de Dalida) la remercie, par l'intermédiaire de Dhomont, pour un envoi (une photo ?), Louis Gasté (futur époux de Line Renaud) lui écrit pour demander l'adresse de ce colonel et le compositeur Louiguy lui signale la perte de plusieurs partitions qu'il lui avait fait parvenir par l'intermédiaire d'un ami commun.
Mais l'ambiance parisienne au moment de la Libération n'est sans doute pas favorable à la carrière d'une jeune artiste. Mary-Lyse revient à Lille, elle fait faire plusieurs photos chez R. Vermesse, successeur de B. Mischkind à Roubaix et la radio de Lille la contacte pour lui proposer de passer à l'antenne. Puis les demandes de concert recommencent à arriver : à Roubaix puis à l'Université de Lille, pour les Forces Unies de la Jeunesse Patriotiques, où elle retrouve son ami Robervyl.


affiche, collection personnelle


En mars elle est engagée par la nouvelle agence "Art et Jeunesse" de Bibos et Edouard Rombeau, pour des contrats à Lille, Orchies et Roubaix. En 1945 et 1946 elle fait plusieurs passages à Radio Lille. Elle chante aussi pour les associations d'anciens prisonniers de Roubaix et en 1949 pour les ingénieurs des Mines à Billy-Montigny. En août 1950, Nord Matin signale sa présence en vacances à Eppe-Sauvage. Je relève encore quelques concerts à Flers-Breucq et à Bavay pour les anciens prisonniers de guerre. Le dernier concert connu a lieu en mars 1951 à Bavay, puis il n'y a plus de trace de prestations dans le fonds d'archives personnelles acheté, il y a longtemps, sur une brocante, à sa belle-fille qui a eu la très bonne idée de ne pas détruire ces souvenirs. Qu'elle en soit vivement remerciée.
Elle meurt à Cucq (62) en février 1998, précédant de quelques mois son mari Léon ROGER, ancien artiste fantaisiste, qui décède en décembre de la même année à Camiers (62).

Christian Declerck


en concert, sans doute à Bavay, vers 1950
collection personnelle

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Mary-Lyse 1923-1998
photos de Robert Vermesse, portraitiste à Roubaix
collection personnelle